V1.3

Dr.Francis Muguet: francis.muguetunige.ch
KNIS, Research Group
Département des Systèmes d'Information
Université de Genève





Introduction aux « Classes »
de nommage

Un changement de paradigme dans la gouvernance
ouvrant de nouvelles opportunités
pour affronter la crise économique mondiale


Introduction générale aux classes de Nommage


Une classe est le paramètre qui définit un réseau dans lequel on peut installer un espace de nommage. Les classes sont déterminées par la RFC 2929. Le réseau Internet dont nous faisons tous usage, utilise la classe « IN » dont le nommage est géré par l'ICANN. A l'heure actuelle, en pratique, le champ classe ne prends que la valeur « IN », mais il existe jusqu'à 65,000 classes disponibles et non utilisées.


C'est sur cette liste de classes non-utilisées que repose le projet « Net4D » ( http://net4d.org ) ( cad Network for Devolpement ) proposé par Francis Muguet. L'esquisse en fut présentée pour la première fois (Net4D
New classes to bind people and machines)
à l'Internet Governance Forum de Rio en 2007. Le projet fut présenté avec plus de détails (Towards an open governance of the DNS system ) à l'internet Governance Forum d'Hydérabad en 2008.


La configuration réseau d'un internaute comporte un logiciel DNS client, aussi appelé « résolveur »; qui pointe sur un serveur DNS qui va répondre par une adresse IP à une demande comportant un nom de domaine. Les clients DNS figurent dans de nombreuses applications ( navigateur, ftp, client de courriel, etc.. ). Lorsque l'utilisateur accède au réseau, dans la plupart des cas, ce serveur DNS est déterminé par défaut par le FAI, et lui aussi par défaut, répond dans la classe « IN ».


Il est important de souligner que le système DNS a été conçu dès l'origine pour servir d'outil de nommage pour des réseaux autres que l'Internet, notamment les réseaux Chaosnet ( classe CH ) et Hesiod ( classe HS ). Ces réseaux, maintenant uniquement d'un intérêt historique, n'ont jamais été placés sous la gouvernance de l'IETF ou de l'ICANN. Ce qui constitue des précédents juridiques très significatifs. Chaque classe est un espace de nommage autonome qui dispose de son propre système de serveurs DNS racines ( Root Servers ) et de sa propre gouvernance.


A partir des années 1995, des mise en oeuvres d'un certain nombre de racines DNS alternatives (alternative DNS roots ) ont fragmenté et perturbé la classe IN gérée par l'ICANN . C'est alors qu'en 2001, l'ICANN elle-même a recommandé l'utilisation des classes non-utilisées, en particulier une des 256 classes réservées pour un « usage privé » aux fins d'expérimentation. Les alternative DNS roots ont été des échecs commerciaux et techniques.


Les RFCs (Request For Comments) sont édités par l'Internet Engineering Task Force (IETF) qui développe les standards de l'Internet, en coopérant étroitement avec le W3C et l'ISO / CEI et les organismes de normalisation. C'est un organisme de normalisation, sans adhésion formelle ou d'adhésion. Tous les participants et les dirigeants sont des bénévoles, même si leur travail est généralement financés par leurs employeurs ou bailleurs de fonds; par exemple, l'actuel président est financé par VeriSign et l'Agence de Sécurité Nationale (NSA) des États-Unis.


C'est la RFC 2929 qui s'occupe de la question des classes. En outre des classes CH et HS, et de 256 classes que chacun peut librement utiliser pour un « usage privé », les autres 65000 classes restent non assignées, et peuvent être assignées suivant un « consensus IETF ». Si l'IETF décidait de bloquer l'attribution de classes pour étouffer la compétition, on pourrait alors légitimement se poser la question en quoi l'IETF, dont la sphère de gouvernance est restreinte à l'Internet, est qualifiée pour assigner une classe à un réseau autre que le sien cad, l'Internet. Selon le droit international public, la gouvernance et l'arbitrage entre les réseaux de télécommunication serait plutôt du ressort d'une organisation internationale comme l'Union internationale des télécommunications,, ce que d'ailleurs l'ICANN a reconnu dans son Article 4, ICANN’s Articles of incorporation ICANN “shall operate […] its activities in conformity with relevant principles of international law and applicable international conventions and local law” and “shall corporate as appropriate with relevant international organizations.” - .


Il est proposé de constituer d'autres réseaux basés sur le protocole IP, et donc utilisant les même tuyaux techniques que le réseau Internet, mais juridiquement distincts parce qu'utilisant précisément une classe de nommage différente.


Pour qu'une classe soit utilisable en pratique, il faut qu'un client DNS ou « résolveur » puisse recevoir du serveur DNS l'adresse IP correspondant à un Nom de domaine dans cette classe. Le logiciel BIND1 est le plus connu des serveurs DNS mais il en existe d'autres.2 La plupart des clients et serveurs DNS ne mettent pas en oeuvre l'intégralité des RFCs, dont la RFC 2929. Le champ classe est souvent considéré comme une donnée fixe ayant pour valeur IN. Par conséquent, il faudra que ces logiciels clients et serveurs soient mis à jour, et que le champs corresponde à une véritable variable, ce qui n'offre pas de difficulté technique particulière.


Il n'y a pas de fragmentation de l'espace de nommage. L'utilisation parralèle de plusieurs classes, est possible : les internautes peuvent utiliser des systèmes concurrents en même temps parce qu'ils ont la possibilité d' être supportés par les mêmes serveurs DNS.. C'est transparent pour l'utilisateur, tout comme le sera la transition d'IPv4 à Ipv6 qui opère à un niveau différent. Il n'y a aucun problème technique conceptuel.


En pratique

Les internautes indiqueront la classe avec un champ supplémentaire placé devant le nom de domaine. La syntaxe pourrait être classe% placé devant le nom de domaine. Par exemple pour la classe 4d ( correspondant au réseau Net4D) et la classe CT ( correspondant au réseau en cyrillique Сеть, réseau en russe ) on pourrait avoir les URLs suivantes :

http://4d%fr.wikipedia.open
http://
ст%Москва.ро 
Dans les navigateurs actuels, il n'est plus besoin de taper http:// et

donc ст%Москва.ро suffirait, et même pour un scripteur uniquement cyrillique, on peut imaginer qu'il mette par défaut la classe CT dans son, navigateur et il lui suffirait alors de taper Москва.ро, sans avoir à utiliser aucun caractère ASCII.



Utilisations possibles des Classes


L'utilisation des classes peut aider à l'émergence de nouveaux usages par une utilisation différente de la Toile. Plus tournée vers de nouveaux développements, cette nouvelle Toile sera plus dynamique et constituera une nouvelle « frontière » qui permettra l'innovation technologiques ainsi qu'une ouverture en direction de la Société Civile et d'espaces linguistiques nouveaux , ainsi que de répondre aux attentes des industries innovantes et des pays émergents.


L'utilisation de nouvelles Classes peut être le vecteur d'une utilisation différente de la Toile dans les pays émergents, avec des coûts qui sont directement déterminés par l'organe de gouvernance de la classe, et donc potentiellement beaucoup plus faible.


Cela pourrait passer par la toile sémantique ( semantic web ) où un marquage par des balises et des tags des contenus suivant des schémas de métadonnées 3et de langages logiques (ontologies) permet un accès beaucoup plus pertinents aux données qu'en plein texte.


L'innovation juridico-technologique est que dans certaines classes dites classes sémantiques, les propriétaires de noms de domaines soient contractuellement obligés de suivre une certaine ontologie, sous peine de perdre le nom de domaine, ce qui permettrait de créer des espaces de nommage où il est possible d'accorder confiance aux métadonnées.


Conséquence importante, celà redéfinirait le marché des moteurs de recherche, actuellement en situation de quasi-monopole.


Un autre point important, et non le moindre, est que les classes pourraient utiliser l'UTF8, permettant une mise en oeuvre naturelle, plus simple et plus performante de multilinguisme, au lieu du système actuel, dont les progrès sont très lents, et qui repose uniquement sur l'ASCII et une transcription UTF8 – ASCII.



Des applications à explorer :

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D'un point de vue politique, l'existence de nouvelles classes correspond à une révolution dans la gouvernance de l'espace de nommage de l'Internet et des réseaux IPs. Il s'agit d'une révolution constructive, car les différentes gouvernances peuvent co-exister techniquement.

Au niveau sécurité du DNS, la sécurisation centralisée de l'ICANN pourrait alors être remplacée par des systèmes de sécurités décentralisés et différents selon chaque classe, offrant ainsi une indépendance politique et commerciale pour tous les acteurs. Dans le système DNSSEC, l'autorité de signature (root signing authority) peut être distincte selon chaque classe.

Au niveau économique, les classes ouvre le marché du nommage à la compétition entre potentiellement 65,000 acteurs et mettent fin au monopole de l'opérateur historique : ICANN.

Au niveau scientifique et technologique, les classes permettent à l'innovation ( par ex les classes sémantiques, le multiliguisme , M2M, ... ) de pouvoir s'éclore.


La mise en oeuvre des « Classes »


Expérimentations

Si le passage aux classes ne peut pas être envisagé immédiatement dans le cadre d'un déploiement général - sauf dans des régions sous une gouvernance centralisée - il faut envisager des périodes d'expérimentation dans diverses zones ayant un intérêt marqué pour le projet, soit pour des raisons politiques, ou économiques, soit pour des raisons locales (langue, contexte multiculturel, etc.).

L'expérimentation peut être réalisée au niveau d'un pays, d'une région, d'une ville en utilisant l'une des 256 classes prévues pour un usage privé.

Dans la zone d'expérimentation, on s'assurera que sont mis en oeuvre les classes, chez

1) tous les serveurs DNS des principaux FAIs opérant sur la zone

2) les serveurs et clients DNS, les serveurs web et autres applications, des entreprises, locales ou distantes, opérant sur la zone

3) les serveurs et clients DNS, les serveurs web et autres applications, des autorités locales ( ou même nationales) ,des associations, des particuliers opérant sur la zone

4) les clients DNS et les navigateurs des utilisateurs participant à l'expérimentation

La participation des principaux FAIs sur la zone est une condition obligatoire et contractuelle pour démarrer une expérimentation, La participation des autres acteurs se fera sur la base du volontariat, avec un site web recensant d'une manière dynamique tous les participants.


Conclusions


Les classes de nommage peuvent donner un second souffle au développement scientifique, technologique et économique de la toile en ouvrant, par la compétition, de nouveaux espaces de liberté et d'indépendance. Les classes de nommage constituent certainement un élément stratégique clef pour confronter la crise économique mondiale.


Remerciements


L'auteur remercie chronologiquement Chantal Lebrument pour son interview qui a été le point de départ de la présente note, puis Michel Tchonang ( CAPDA) pour ses observations et contributions.

1http://fr.wikipedia.org/wiki/BIND

2http://en.wikipedia.org/wiki/Comparison_of_DNS_server_software

3http://openweb.eu.org/articles/dublin_core

4 Aide pour un vrai multilinguisme dans l'internet en s'appuyant sur une traduction de deux langues donnant un référentiel reconnu. Lorsqu'il existe un doute sur la traduction d'un terme – par exemple « company » et « society » - si ce texte existe en deux langues, les logiciels de traduction se basent sur la seconde langue, validée, pour définir le bon terme. Ensuite, la 3e langue se base sur les deux précédentes, etc.

5http://fr.wikipedia.org/wiki/UTF-8

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